Griezmann, de Mâcon à Rio
Le joueur de la Real Sociedad rejoindra les Bleus à Clairefontaine dès aujourd’hui. A 23 ans, il incarne un réel vent de fraîcheur au sein du groupe France.
mercredi 21 mai 2014
Il a gagné son pari. Enfin, de pari, ce n’en était plus vraiment un depuis longtemps. Antoine Griezmann présent dans la liste des 23 de Didier Deschamps, cela ne fait pas vraiment de doute à l’heure de lever le voile sur la sélection, il y a huit jours. Le 5 mars dernier, en décrochant sa première cape contre les Pays-Bas (2-0) et en se montrant plutôt à son aise (décisif sur les deux réalisations françaises), le natif de Mâcon sait qu’il vient de valider son billet pour le Brésil. De Mâcon à Rio, le petit Bourguignon aura fait de la route. Des centres de formation où il fut rejeté en raison d’un physique jugé trop frêle à l’ambiance sans nulle autre pareille des pelouses sud-américaines, Griezmann n’aura jamais perdu de vue son objectif : briller.
Ce qui fait généralement la force d’un joueur fluet en pleine maturité (Valbuena, Messi, pour oser la comparaison) fait souvent sa faiblesse dans les bas âges. Trop petit, tu prends la sortie. « Antoine était un petit gabarit, mais il était déjà très technique, se rappelle pourtant Thierry Comas, son entraîneur en catégorie U13 à Mâcon. Ce qu’il est parvenu à réaliser, c’est extraordinaire. Il s’est vraiment battu pour arriver à ce niveau ». Sous ses mèches teintées de blond, le jeune Français est un sacré travailleur, un jeune homme sérieux qui finit par côtoyer le centre de formation de la Real Sociedad sans abandonner ses études pour autant. Avec les échecs, le petit Mâconnais comprend très vite que rien n’est jamais gagné en football. Ses premiers pas dans le club de Saint-Sébastien le voient donc régulièrement passer la frontière pour suivre ses cours, à Bayonne.
La pataugeoire ou le grand bain
Couvé par ses formateurs espagnols, Antoine Griezmann fait murir son jeu et à la manière d’un super-héros en devenir, il se pare d’un saillant costume. Un costume de tortionnaire de défenses. Quand il joue, le néo-Bleu fait passer de sales moments à ses adversaires. La défense centrale de Barcelone ne peut rien en février dernier lorsqu’il surgit à vive allure pour reprendre un centre de Carlos Vela (3-1). Et que dire des supporters de l’OL, figés de stupeur sur leur siège lorsqu’il reprend accrobatiquement un autre centre de Vela pour priver de Ligue des Champions ce club qui l’avait jadis recalé pour son physique ? « Ce n'était pas une revanche, confie-t-il timidement peu après la rencontre. Je voulais juste montrer mon niveau de jeu en France. »
Malgré ces coups d’éclat, Griezmann et son unique sélection demeurent un mystère pour le grand public. Celui qui détale dans son couloir, celui qui joue juste le cuir sous les crampons est surtout connu pour ses frasques et sa suspension suite à sa virée nocturne avec les espoirs en 2012. Une reconnaissance injuste qui ne fait pas honneur au joueur sérieux qu’il incarne. Derrière ses pupilles chétives se cache un grand joueur en devenir qui ne demande qu’à grandir. Un footballeur de 23ans pétri de talent qui aura su attendre son heure. Avant que l’on ne sache, certainement lors des matches amicaux, si Deschamps lui réserve le pataugeoire ou le grand bain au Brésil, le joueur de la Real s’est ressourcé cette semaine en famille, à Mâcon, où on l’a accueilli avec les honneurs. A Clairefontaine ce soir, Antoine Griezmann s’endormira sur ses années de minot. Le voilà définitivement dans la cour des grands.